Quels sont les incidences d’un accident de travail interimaire ?
Ils sont de deux ordres, juridique et financier. Juridique, car l’accident de travail interimaire entraînera une enquête qui tentera de mettre en lumière l’absence ou le caractère incomplet du Document Unique, particulièrement sur la partie « risque lié au personnel intérimaire ». Financier, car selon la valeur de votre Document Unique, la prise en charge de votre entreprise sera différente pour cet accident de travail interimaire.
Nous allons donc aborder dans cet article, les critères qui font que l’accident de l’interimaire sera considéré comme un accident de travail intérimaire, nous verrons ensuite les formalités obligatoires à suivre, la situation du salarié intérimaire et enfin l’impact juridique et financier dans le détail.
1) Quelles sont les critères de reconnaissance d’un accident de travail interimaire ?
Les critères de reconnaissance de l’accident du travail interimaire (ou non) ont été définis par la jurisprudence.
- L’accident de travail interimaire est survenu à l’heure et sur le lieu du travail
Sauf preuve contraire d’une cause étrangère au travail, tout accident survenu à l’heure et sur le lieu du travail est réputé être un accident du travail. Le lieu de travail recouvre l’ensemble des locaux de l’entreprise et ses dépendances, telles que le parking ou la cantine.
Le salarié d’astreinte chez lui ne rentre pas dans la législation des accidents du travail, sauf à se trouver dans un lieu imposé par l’employeur.
Le salarié en télétravail qui subit un accident à l’occasion de l’exécution de travaux confiés par l’employeur est considéré, lui aussi, comme victime d’un accident du travail.
- L’accident de travail interimaire est constitué de faits précis et inattendus
L’accident du travail doit pouvoir être daté et doit pouvoir être la conséquence de circonstances certaines (coupure, brûlure, chute, douleurs soudaines à l’occasion d’un geste précis).
Cette précision exclue les lésions et pathologies survenues graduellement notamment dues à la répétition d’un geste ou à l’action prolongée d’une circonstance ou d’un matériau (l’exposition au froid ou l’usage d’un outil de travail).
L’accident du travail se différencie ainsi de la maladie professionnelle qui se caractérise par une évolution lente ou progressive et pour laquelle on ne peut donner avec certitude une origine et une date certaine.
- L’accident de travail interimaire survient à l’occasion de l’exécution du travail
Le salarié doit être en train d’effectuer son travail et doit se trouver sous l’autorité et le contrôle de son employeur, ce qui n’est pas le cas lorsqu’il vaque à des occupations personnelles durant les pauses sur son lieu de travail (par exemple, il est possible de vous faire livrer vos colis sur votre lieu de travail, à cette occasion un lumbago pour soulever un colis personnel trop lourd n’est pas considéré comme accident de travail).
L’accident du travail n’est pas retenu lorsque le contrat de travail est suspendu par exemple pendant les congés payés ou pendant le préavis si le salarié est dispensé de son exécution.
La cause de l’accident importe peu : il peut s’agir de circonstances ou éléments extérieurs ou même de la faute du salarié ou de l’un de ses collègues comme un faux mouvement ou le non-respect de consignes de sécurité (par exemple, oubli de porter un EPI).
- L’accident de travail interimaire survient pendant une mission
Le salarié exécutant une mission pour son employeur est considéré comme étant sous le contrôle de ce dernier pendant toute la durée de sa mission. Il bénéfice par conséquent de la protection des accidents du travail pour tout accident survenu pendant la mission, même à l’occasion d’un acte de la vie courante et même s’il ne s’agit pas d’un acte en rapport avec son travail.
Exemple : au cours d’une pause, le salarié est victime d’un accident alors qu’il part déjeuner ou prendre un café.
- L’accident de travail interimaire doit laisser apparaître une lésion
Une lésion physique interne ou externe doit exister. Mais il peut s’agir aussi de troubles psychologiques ou de douleurs, à condition qu’ils soient apparus soudainement.
La dépression, le suicide d’un salarié, voire la tentative de suicide, même à son domicile, peuvent être considérés comme un accident du travail s’ils surviennent par le fait du travail ou en sont la conséquence directe (reproches de l’employeur ayant entraîné l’acte, dépression liée à un stress professionnel ou un entretien d’évaluation défavorable, etc.).
C’est au salarié de prouver qu’il a été victime d’une lésion survenue à l’occasion de son travail.
Les seules déclarations du salarié même assorties d’un certificat médical ne suffisent pas. Elles doivent être confirmées par des faits qui peuvent être matériellement constatés : panne d’une machine, effondrement d’un mur, chute d’un objet. La déclaration de témoins est également recommandée pour attester l’accident du travail.
La persistance de séquelles consécutives à l’accident du travail ne suffit pas : il faut prouver une aggravation de ces séquelles sans motif apparent pour que celle-ci soit prise en charge.
2) Quelles sont les déclarations obligatoires suite à d’un accident de travail interimaire ?
En cas d’accident du travail, certaines déclarations sont obligatoires. Elles incombent aussi bien au travailleur intérimaire victime d’un accident de travail intérimaire, qu’à l’entreprise de travail temporaire et à l’entreprise utilisatrice (l’entreprise dans laquelle l’intérimaire effectue sa mission d’intérim).
Déclarations obligatoire de la part du travailleur intérimaire
Déclaration à l’agence de travail temporaire
L’intérimaire victime d’un accident de travail doit en informer son agence d’intérim dans la journée durant laquelle l’accident est survenu. Le délai entre l’accident du travail et sa déclaration auprès de la société d’intérim ne doit pas dépasser 24 heures. (Sauf cas de force majeure, d’impossibilité absolue ou de motifs légitimes. Cette déclaration peut-être faite sur le lieu de travail (les bureaux de l’agence d’intérim étant également considérés comme lieu de travail) ou par lettre recommandée.
Déclaration à l’entreprise utilisatrice
La déclaration d’accident du travail (ou d’accident de trajet) par l’intérimaire doit être faite auprès de l’entreprise utilisatrice dans les 24 heures, soit sur les lieux de l’accident, soit par lettre recommandée.
Déclarations obligatoire de la part de l’entreprise de travail temporaire
Déclaration à la Caisse Primaire d’Assurance Maladie (CPAM)
Dans le cas ou la déclaration de l’accident n’aurait pas était faite par l’entreprise de travail temporaire auprès de la CPAM, la victime de l’accident (l’intérimaire) peut effectuer cette déclaration auprès de la CPAM dont elle relève et ce jusqu’à l’expiration de la seconde année qui suit l’accident. La caisse primaire d’assurance maladie doit alors, à réception de la déclaration, en adresser un double au médecin du travail ainsi qu’à l’employeur.
En parallèle l’entreprise de travail temporaire envoie à son salarié une lettre de réserve sur l’accident du travail et sa responsabilité, ainsi que la feuille d’accident du travail pour obtenir la gratuité des soins.
Déclarations obligatoire de la part de l’entreprise utilisatrice
Dès que l’entreprise utilisatrice est informée de l’accidente, elle est tenue, dans un délai de 24 heures, de transmettre par lettre recommandée, avec accusé de réception, un exemplaire de l’information préalable :
a) à l’entreprise de travail temporaire qui établit la déclaration d’accident du travail et l’adresse à la caisse primaire d’Assurance maladie dont dépend la victime,
b) au service prévention des risques professionnels de la CRAMIF,
c) à l’inspection du travail.
accident de travail intérimaire
3) Quelle est la situation du travailleur intérimaire durant l’arrêt suite à l’accident de travail interimaire ?
- Le travailleur intérimaire perçoit des indemnités journalières, IJ, s’il remplit les conditions vis à vis de la Sécurité sociale.
- Les IJ sont calculées sur la base de la rémunération des 12 derniers mois de date à date, précédant l’arrêt de travail.
- Il bénéficie du régime complémentaire (prévu par l’accord du 23/01/2002 étendu).
4) Quel est le coût de l’accident de travail interimaire ?
Le coût est réparti entre l’entreprise de travail temporaire et l’entreprise utilisatrice.
Pour déterminer le taux de cotisation des AT :
- 2/3 pour l’entreprise de travail temporaire.
- 1/3 pour l’entreprise utilisatrice.
Cependant, la Cour de Cassation, dans un arrêt du 17 décembre 2009, se prononce sur la répartition de la charge du coût de l’accident du travail lors du recours à un intérimaire.
En l’espèce, un salarié intérimaire a été victime d’un accident du travail, il est alors imputé au compte de l’utilisateur (entreprise utilisatrice) un tiers pour la détermination du taux de cotisation d’accidents du travail.
La société d’intérim demande à ce que l’intégralité du coût financier de l’accident soit à la charge de l’entreprise utilisatrice, l’accident étant dû à la faute inexcusable de l’employeur.
L’article R 242-6-1 du Code de la sécurité sociale met en place une répartition des coûts liés aux accidents du travail.
Cependant, dans cet arrêt la Cour de Cassation édicte que l’accident dont le salarié a été victime « ayant été jugé entièrement imputable à la faute inexcusable de l’entreprise utilisatrice sans qu’aucun manquement ne soit relevé à l’encontre de la société, les données de l’espèce conduisent à porter intégralement le coût de l’accident au sens de l’article R. 242-6-1 du code de la sécurité sociale à la charge de l’entreprise utilisatrice».
En conséquence, la Cour reconnait la possibilité, malgré la répartition réglementaire, d’opérer un transfert intégral de la charge du coût de l’accident du travail, dès lors que celui-ci est lié à un manquement de l’entreprise utilisatrice, notamment dans le cadre de la faute inexcusable.
Je vous rappelle que l’absence ou l’insuffisance du Document Unique établit automatiquement la faute inexcusable de l’employeur.
Je vous recommande donc la lecture de mon récent article « Document Unique : La sécurité des Travailleurs Intérimaires » pour vous aider à mettre en place le plan d’actions proposé dans votre Document Unique et ainsi de diminuer l’accident de travail intérimaire dans vos entreprises.
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Bien cordialement,
Patrick Ducloux
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