Document Unique : Inégalité homme femme 22 janvier
Comment intégrer l’inégalité homme femme ?
La loi a changé récemment sur l’évaluation des risques professionnels avec l’apparition d’une nouvelle disposition concernant l’égalité homme/femme.
Dans cet article nous aborderons successivement :
● le cadre juridique
● les chiffres concernant la disparité homme/femme pour la sécurité du travail
● une première approche pour intégrer cette disparité dans le Document Unique
1) La loi et ses conséquences sur l’évaluation des risques professionnelles :
La loi du 4 août 2014 n° 2014-873 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes vient d’apporter son lot de nouveautés en matière de prévention des discriminations par genres.
Un des volets, qui concerne directement la Santé et Sécurité au Travail, vient modifier l’approche relative à la démarche d’évaluation des risques professionnels en matière de santé et sécurité au travail, et demande désormais aux entreprises d’intégrer « l’impact différencié de l’exposition au risque en fonction du sexe » (article L4121-3 du Code du travail).
Le rôle de l’employeur est désormais d’établir une méthodologie pour intégrer ces paramètres dans l’évaluation des risques et la mise à jour du document unique.
2) De quoi parlons-nous ? Accidents du travail : les femmes plus concernées que les hommes
Les accidents au travail touchant les femmes ont évolué en sens inverse, par rapport aux hommes, sur la période 2001-2012. C’est ce que montre une étude réalisée par l’ANACT qui a choisi de s’intéresser à la différence homme/femme.
Pourtant, au total, les accidents sont en baisse (environ 14 % sur dix ans), grâce notamment au renforcement des mesures de précaution dans plusieurs branches d’activités. Dans les secteurs de la métallurgie, de la chimie, du bois et du textile, par exemple, traditionnellement plus masculins, le nombre de postes exposés à des risques a diminué et la politique de prévention est assez ancienne, explique l’étude.
- La baisse globale des accidents du travail masque une hausse pour les femmes
- Augmentation deux fois plus rapide des maladies professionnelles pour les femmes
Autre chiffre inquiétant, la progression « exponentielle » de la reconnaissance des maladies professionnelles chez les femmes (+ 170 %) par rapport aux hommes (+ 91 %) : les maladies professionnelles reconnues sont moins fréquentes mais plus graves chez les hommes.
« Les troubles musculosquelettiques représentent, en 2012, près de 78 % du total des maladies professionnelles indemnisées », précise l’étude. Un risque qui touche davantage les femmes, tandis que les hommes sont plus exposés aux cancers (97 % des reconnaissances de cancers professionnels concernent les hommes).
En 2012, les branches qui enregistrent le plus de maladies professionnelles pour les femmes sont le commerce, l’industrie de l’alimentation, les services de santé et de nettoyage ainsi que le travail temporaire. Chez les hommes, les branches les plus exposées sont la métallurgie, les transports, l’énergie et le BTP.
3) Prévention des risques professionnels : Comment intégrer la différence de sexe ?
En quoi le travail des femmes diffère-t-il ?
Les femmes ont tendance à occuper des postes différents de ceux qu’occupent les hommes et font face à d’autres types de risques professionnels.
Les 12 emplois les plus communs chez les femmes en 2011 étaient les suivants :
- Agents d’entretien
- Enseignants
- Employés administratifs de la fonction publique (cat. C)
- vendeurs
- Aides à domicile et aides ménagères
- secrétaires
- Aides-soignants
- Infirmiers, sages-femmes
- Assistants maternels
- Employés administratifs d’entreprise
- Employés de la comptabilité
- Cadres des services administratifs, comptables et financiers.
Même lorsque les femmes ont les mêmes désignations de postes que les hommes, leurs tâches spécifiques diffèrent souvent (p. ex. femmes de ménage, caissières de banque et travailleuses de la santé). Avec les différences physiques entre l’homme moyen et la femme moyenne, comme la taille, la forme du corps, le centre de gravité, la force du haut du corps, le système reproducteur et la façon de gérer la douleur, les femmes peuvent réagir différemment des hommes lorsqu’elles exécutent des tâches similaires.
Les emplois que les femmes occupent habituellement sont en général plus répétitifs, monotones et stressants que ceux qu’occupent les hommes. Les femmes sont plus exposées que les hommes aux entorses dorso-lombaires, aux problèmes de peau, aux maux de tête et à la fatigue oculaire.
Les tâches impliquant la prestation de soins, d’un accompagnement et d’un soutien constituent des composantes clés du travail féminin, alors que les tâches des hommes sont, selon la tendance, encore axées sur le travail manuel « lourd », les tâches techniques et le travail de direction. Le risque de subir de la violence est aussi plus présent dans les emplois occupés par les femmes.
Quels sont les dangers « invisibles » auxquels les femmes font face ?
Les problèmes de santé et de sécurité liés aux emplois féminins sont souvent issus d’un ensemble de dangers, dont certains sont invisibles. Cette invisibilité rend difficile tout effort visant à identifier la cause d’un problème.
Le stress causé par de mauvaises conditions de travail est en soi un risque professionnel important. Partout dans le monde, les femmes sont toujours moins payées pour un travail de valeur égale et sont plus nombreuses à occuper des emplois à temps partiel, comparativement aux hommes. Les Françaises font aussi plus de travail lié à l’entretien du foyer et aux soins des enfants que les hommes. En moyenne, les femmes qui travaillent à temps plein ont une plus grande charge de travail que les hommes.
En plus de leurs responsabilités au travail et à l’extérieur, les femmes peuvent faire face à de longues journées stressantes. Elles doivent en plus composer avec des facteurs inhérents aux emplois féminins, c’est-à-dire des emplois monotones, où elles ont peu de contrôle et de pouvoir décisionnel. Il n’est donc pas étonnant de constater que les femmes sont plus à risque que les hommes de développer des maladies liées au stress, des problèmes musculo-squelettiques (douleurs) et une fatigue chronique.
Quels sont les autres dangers inhérents aux emplois occupés par les femmes ?
Nous en savons moins sur les risques professionnels associés aux emplois occupés par les femmes, que sur ceux liés aux emplois occupés par les hommes.
Voici quelques exemples de risques qu’encourent les femmes au travail :
- sur le plan des substances chimiques et minérales : poussières, vapeurs, émanations, gaz, brume, liquides tels les solvants de nettoyage;
- sur le plan infectieux et biologique : virus, maladies transmises par le sang, objets pointus et tranchants et aiguilles, bactéries, moisissure associée aux soins de santé et à d’autres types de travail;
- sur le plan de la sécurité : risques de trébucher, blessures traumatiques, blessures liées aux travaux domestiques, glissements et chutes, déplacement de matériel et de pièces;
- sur le plan de la conception ergonomique : répétition, posture, force (pousser / tirer), vibration, pression sur le corps, organisation du travail (procédures et tâches mal conçues), environnement de travail;
- sur le plan physique : bruits, température et humidité, radiations, vibrations, électricité, éclair; et
- sur le plan de l’organisation du travail ou des facteurs de stress psychologique :
- charges de travail faible / élevée;
- cadence / intensité;
- manque de formation;
- heures de travail;
- peu de contrôle, sinon aucun, sur ce que vous devez faire ou sur la façon de le faire;
- absence de soutien social / de relations;
- harcèlement ou discrimination ou menaces de violence physique ou mentale; et
- aucune souplesse en matière de congés.
Comment tenir compte de la différence de sexe ?
En vertu de la loi, l’employeur est tenu, de veiller à ce que le milieu de travail soit sain et sécuritaire pour tous ses employés. Il est le mieux placé pour apporter les changements nécessaires en vue de prévenir les accidents.
La représentation graphique des risques en milieu de travail constitue un outil efficace pour aborder les risques selon le sexe. Elle peut être adaptée de façon à ce que les hommes et les femmes puissent effectuer respectivement leurs propres transparents, lesquels sont posés sur un dessin illustrant le plan des lieux de travail. Ceci permet de comparer les expériences des femmes et des hommes dans un même lieu et de rendre visible la différence de vécu entre hommes et femmes.
Ces mêmes représentations pourront être intégrées dans le Document Unique pour intégrer l’impact différencié de l’exposition au risque en fonction du sexe.
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Patrick Ducloux
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